L’article 12 du Projet de loi de Finances (PLF) pour 2018 a pour objet de supprimer l’Impôt Solidarité sur la Fortune (ISF) pour lui substituer l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI).
Avant même la présentation du projet, certaines voix se sont élevées pour souligner le risque d’une censure constitutionnelle du principe même de l’IFI, censure qui serait fondée sur une rupture d’égalité des contribuables non suffisamment justifiée par un motif d’intérêt général.
Rappelons que dans le programme présidentiel de LREM, l’objectif avancé du remplacement de l’ISF par l’IFI était « de soutenir ceux qui prennent des risques, ceux qui permettent de créer et de développer notre économie et d’orienter l’épargne vers le financement de nos entreprises et l’investissement. »
Néanmoins, dans l’exposé des motifs de l’article 12 du PLF, il est seulement indiqué que l’IFI « est institué à des fins budgétaires, de manière à créer une contribution spécifique aux charges publiques pesant sur les actifs immobiliers des contribuables dont le patrimoine immobilier est le plus élevé. »
Autrement dit, il n’a finalement pas semblé opportun au Gouvernement de motiver la mise en place de l’IFI par le but d’orienter l’épargne vers un investissement dit productif ce qui peut paraitre prudent tant l’idée de présenter le secteur immobilier comme improductif par nature peut paraitre contestable.
Pour autant présenter l’IFI comme destiné à taxer les propriétaires d’importants patrimoines immobiliers sur le seul fondement de leur capacité contributive, pourrait amener le Conseil constitutionnel à s’interroger sur la possibilité de considérer que l’IFI fait peser sur les propriétaires d’actifs immobiliers une charge excessive compte tenu de leur capacité contributive, caractérisant ainsi une rupture d’égalité inconstitutionnelle par rapport aux propriétaires d’actifs financiers…
Outre le revers sévère que subirait ainsi une des réformes phares voulues par le Président Macron, une telle censure aurait le principal défaut de laisser intact l’ISF et ses 5 Milliards de coût pour les contribuables contre vraisemblablement moins de 2 Milliards pour l’IFI…
De ce point de vue, il serait préférable que le Conseil constitutionnel concentre son attention sur la constitutionnalité douteuse de certaines mesures spécifiques du projet d’IFI : ainsi en va-t-il de la volonté d’imposer les titulaires de crédits-bails immobiliers, de n’admettre que partiellement la déductibilité des emprunts in fine, de plafonner la déductibilité des dettes au-delà de 5 millions de passif ou encore de refuser par principe la déduction des dettes familiales…
Sandrine QUILICI (Pictet & Cie) & Mathieu LE TACON (Delsol Avocats)
Article à paraitre dans Les Nouvelles Fiscales