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La vérification de comptabilité à distance, nouvelle méthode de contrôle fiscal des entreprises

Depuis le 1er janvier 2017 l’Administration fiscale a la possibilité de mettre en œuvre une vérification de comptabilité à distance. A mi-chemin entre le traditionnel contrôle sur pièces et la vérification de comptabilité de droit commun qui se déroule dans les locaux de l’entreprise, ce nouveau moyen de contrôle à la disposition de l’Administration repose principalement sur l’exploitation des « FEC » que l’entreprise devra, dans ce cadre, communiquer à l’administration.

  • Rappel des formes traditionnelles de contrôle des entreprises

Jusqu’à présent et en dehors des procédures de contrôle très spécifiques (comme le droit de visite et de saisie par exemple), les entreprises se voyaient contrôler par l’Administration fiscale soit à travers un « contrôle sur pièces » soit à travers une « vérification de comptabilité ».

S’agissant du contrôle sur pièces (ou « de bureau »), qui s’applique aux particuliers comme aux entreprises, il correspond à l’ensemble des travaux de bureau au cours desquels l’Administration procède à l’examen critique des renseignements et documents figurant dans les différents dossiers qu’elle détient. Le cas échéant, elle notifie des rehaussements ou dégrèvements sur cette base.

Ce contrôle sur pièce ne nécessite aucune information préalable du contribuable qui en fait l’objet et ne nécessite par ailleurs aucun déplacement physique dans les locaux de l’entreprise concernée.

Si l’examen du dossier révèle une présumée anomalie l’Administration peut alors adresser à l’entreprise une demande de renseignement complémentaires mais également des justifications ou des éclaircissements (article L. 10 du Livre des procédures fiscale).

Si les discordances constatées sont suffisamment précises l’Administration peut aussi tout simplement adresser à l’entreprise une proposition de rectification. A défaut d’anomalie le dossier sera classé sans que l’entreprise n’ait eu connaissance des diligences menées par l’Administration.

S’agissant de la vérification de comptabilité (qui peut d’ailleurs être consécutive à un contrôle sur pièces) il s’agit d’une vérification sur place par l’Administration de la comptabilité de l’entreprise.

Lorsque la comptabilité de l’entreprise est tenue (comme c’est la norme aujourd’hui) au moyen de systèmes informatisés, une procédure spécifique est alors prévue (art. L. 47 A du Livre des procédures fiscales) dans le cadre de laquelle les contribuables doivent remettre au vérificateur, au début des opérations de contrôle, les fichiers des écritures comptables (ou FEC).

  • Le nouveau régime de la vérification de comptabilité à distance

L’article 14 de la Loi de finances rectificative pour 2016 a créé à un dispositif, intermédiaire entre le simple contrôle sur place et la vérification de comptabilité traditionnelle impliquant la présence d’un vérificateur dans les locaux de l’entreprise, qui devrait permettre à l’Administration d’augmenter à moindre coût les contrôles effectifs de la comptabilité des entreprises.

Si elle peut s’appliquer à tout type d’entreprise cette vérification de comptabilité à distance ne devrait pas trouver en pratique à s’appliquer aux entreprises qui présentent des risques élevés de fraude ou dont la taille et la complexité des sujets nécessiteraient une vérification sur place.

En tout état de cause, la loi prévoit donc désormais (art. L. 13 G du LPF) que l’Administration peut examiner la comptabilité des entreprises astreintes à présenter des documents comptables au moyen de système informatisés, sans se rendre sur place.

Pour ce faire, l’Administration devra préalablement adresser à l’entreprise un avis d’examen de comptabilité qui comportera les mêmes mentions que celles figurant sur les avis de vérification de comptabilité classique.

Dans les 15 jours de la réception de cet avis (délai qui sera probablement très court pour beaucoup d’entreprises et devra donc obliger celles-ci à anticiper la survenance d’une telle demande), l’entreprise devra adresser à l’Administration une copie des FEC sous forme dématérialisée.

Dès que les FEC lui auront été communiqués, l’Administration pourra procéder à des tris, classements et calculs à partir desquels elle pourra interroger l’entreprise, lui demander des renseignements, justifications ou éclaircissements, de façon à identifier d’éventuels manquements.

Dans le cadre de ses réponses l’entreprise pourra fournir des informations complémentaires sous forme de fichiers qui pourront directement faire l’objet de traitements informatiques de la part de l’Administration.

Au plus tard dans les 6 mois de la réception des FEC, l’Administration devra, soit informer l’entreprise de l’absence de rectification, soit lui adresser une proposition de rectification selon les règles de droit commun.

Par ailleurs, avant la mise en recouvrement ou avant la notification de l’absence de redressement, l’Administration devra détruire les copies des fichiers transmis.

Dans le cas où la vérification concerne une petite entreprise au sens du I de l’article L. 57 A du Livre des procédures fiscales (car, par exemple, réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 1,526 M€ pour une entreprise industrielle ou commerciale vendant des marchandises, objets, fournitures ou denrée à emporter ou consommer sur place, ou de fournir le logement), l’Administration devra répondre aux observations du contribuable dans un délai de 60 jours.

D’une manière générale lorsque les conditions seront remplies la procédure contradictoire s’appliquera et la possibilité d’un dialogue entre l’entreprise et l’Administration devra être préservée. Les échanges seront réalisés au cours de la procédure par voie orale ou écrite.

Comme en vérification de comptabilité de droit commun, la saisine du supérieur hiérarchique du vérificateur ou encore de la commission départementale seront envisageables.

En outre, il est à noter que le contribuable pourra demander dans les 30 jours de la réception de la proposition de rectification, une régularisation des erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances et ce, moyennant le paiement d’un intérêt de retard limité à 70% de l’intérêt applicable.

Enfin, le défaut de transmission des FEC dans le délai de 15 jours imparti entraine l’application d’une amende de 5 000 € et peut, de surcroît, déboucher sur une vérification de comptabilité… sur place cette fois.

(Article à paraître dans le numéro de Juin 2017 de la revue Finance & Gestion)